CHAPITRE VI

Il y avait des bains de vapeur et d’eau parfumée, une masseuse aux mains comme des pétales dont les doigts d’acier sondaient et apaisaient la tension de la peau et des muscles. Sa voix était un chuchotement tentateur.

— Vous désirez des délices, Maître ? Une fille qui vous charme, des drogues pour maintenir votre intérêt, des effets visuels pour accroître votre jouissance ? Non ? Un analogue, peut-être ? Vous pourrez savoir ce que c’est que de porter une autre forme, de s’accoupler sous la forme d’une bête, chasser, tuer, se nourrir… nous en avons toute une variété. Non encore ? Alors, vous asseoir et connaître la mort sous une douzaine de façons différentes ? Tous les stimuli des sensibandes enregistrés chez des personnes qui ont brûlé, sont tombées, ont été lentement écrasées. Ou d’autres choses ? Non ? Comme il vous plaira, Maître. Désirez-vous dormir un peu ? Une heure de paix bénéfique produite par des microcourants ? Non ? Reposez-vous donc, Maître, et que vos pensées vagabondent. La clochette est là si vous avez besoin de moi.

La clochette qui commandait tous les bonheurs jamais inventés par l’homme… à condition de payer.

Dumarest l’ignora et, allongé, considéra les images peintes sur le plafond. De vagues scènes naquirent du dessin abstrait, façonnées par le pouvoir de son esprit. Des personnages cuirassés nimbés de feu, des visages sauvages, un autre à la bouche bordée de sang. Les cheveux de jais, d’or, de flammes brillantes. Des femmes qu’il avait connues, aimées et perdues. Les mondes qu’il avait vus, les étoiles, une forme monstrueuse en robe écarlate qui les emprisonnait dans sa toile. Un gamin aux cheveux d’or et aux yeux d’un bleu vif.

Foutu Garfrul. Il ressemblait trop à Jondelle et Dumarest s’était conduit comme un imbécile. Il avait été stupide de se mêler des affaires d’autrui et encore plus de combattre. Et il n’avait rien montré au jeune homme en dehors d’une façon facile de gagner de l’argent, il s’entraînerait, se jugerait capable et paierait sa présomption de vilaines coupures.

Sa petite amie y veillerait.

Dumarest se la remémorait, les contours de son visage encadrés d’une capiteuse chevelure bleu nuit, les yeux qui trahissaient sa nature égoïste. Mais avait-elle eu tort de chercher à obtenir ce qu’elle désirait ? Lallia était un peu comme cela, forte et sans pitié à sa façon, sachant ce qu’elle voulait et assez honnête pour l’admettre. Lallia qui était morte sur un monde de la Toile, tuée par un agent du Cyclan1.

Il songea de nouveau à la forme écarlate en train d’englober les planètes. Le symbole de l’organisation qui visait la domination complète de la galaxie. Ses agents se déployaient pour affecter la moindre sphère d’influence importante. Des cybers, robots vivants dépourvus de toute émotion, qui ne pouvaient connaître que le plaisir des prouesses mentales. Des hommes qui avaient été enlevés quand ils étaient enfants, formés, opérés, le thalamus divorcé du cortex, de telle sorte qu’ils ne puissent jamais connaître la haine, l’amour ou la peur. Des créatures à forme humaine qui, à partir d’une poignée de données, extrapolaient des tendances logiques et prédisaient ainsi le résultat de toute action.

Le Cyclan qui le pourchassait et le poursuivrait toujours tant qu’il détiendrait le secret du jumeau affin que lui avait confié Kalin. Kalin à la chevelure flamboyante2. Des robes rouges, des gemmes rouges, rouge la couleur du sang qui souillait sa route depuis aussi longtemps qu’il en avait le souvenir.

Mais l’on ne trouvait pas de cybers sur Ourelle. Cette culture était trop fractionnée, sans gouvernement central ni dirigeants influents. Ourelle : un monde retardé, presque ignoré, un endroit où il était facile de se perdre.

Était-ce pour cela que Makgar l’avait choisi ?

Dumarest se retourna, énervé, incapable de se délasser véritablement. Le plafond contenait trop d’images, provoquait trop d’associations d’idées… Jondelle et ce qui lui arrivait peut-être… ce qui risquerait de se passer si on ne le retrouvait pas. Pourquoi se souciait-il autant de l’enfant ?

Une promesse faite à une mourante. Sa parole. Cela suffisait.

— Quelle heure est-il ? demanda-t-il au néant.

— Trois heures avant minuit, répondit une voix douce. La nuit est belle mais le ciel est couvert.

Le temps de partir. À l’extérieur du sauna, il marqua une pause et regarda le flamboiement de lumière qui dominait Narn comme une nimbe. De la lumière brillait aussi là où s’étendait l’astroport, derrière la ville : les projecteurs qui éclairaient le moindre centimètre carré de terrain ainsi que la clôture. Sous son regard se posa un vaisseau enveloppé dans un halo bleu de propulseur Erhaft.

Un petit astronef qui se livrait probablement au commerce local, mais qu’il pouvait prendre, l’argent dans sa poche lui permettant de se payer un passage en Haut qui le conduirait vers d’autres vaisseaux qui lui permettraient de faire des voyages beaucoup plus lointains. Mais aucun appareil qu’il connût ne pouvait l’emmener là où il voulait aller.

— Tu as l’air solitaire, l’ami, fit une femme. Ce vaisseau te rappelle ta patrie ? Pourquoi ne pas venir chez moi m’en parler ?

— Non, merci.

— Cela ne te dit rien ? (Elle haussa les épaules.) C’est la vie.

Elle s’éloigna. Dumarest se dirigea vers la Maison du Gong.

Elle était grande, éclatante, couverte de mille lanternes de toutes les teintes et de toutes les combinaisons de couleurs. Des gongs suspendus palpitaient doucement sous l’impact d’une brise artificielle et un gong plus important, percé, formait l’entrée que l’on rejoignait par une volée de marches basses et larges. À leur pied, un personnage encapuchonné tendait une sébile en plastique ébréché. Devant lui, un homme grassouillet accompagné d’une femme couverte de bijoux éclata d’une joie soudaine.

— La charité ? Je n’y crois pas. Un homme doit se débrouiller tout seul et ne pas dépendre des aumônes. Donne-moi une bonne raison pour que je place quelque chose dans ta sébile.

Le moine appartenait à l’Église Universelle, vêtu de sa robe en gros drap, les pieds nus dans des sandales grossières. Sous le capuchon, le visage était ridé, marqué par l’âge et les privations, mais ses yeux étaient jeunes et brillaient d’une compassion infinie.

Il répondit paisiblement :

— Tu vas mettre ta bonne fortune à l’épreuve, mon frère. Puisse la chance t’accompagner. Mais je pense à ceux qui n’ont pas de chance et qui manquent de pain. C’est maintenant l’été, mais l’hiver ne tardera pas à arriver. Une triste saison, mon frère, pour ceux qui n’ont ni argent ni ami.

— Cela ne suffit pas. (L’homme grassouillet hocha la tête.) Je ne suis toujours pas convaincu.

— Tu es joueur, mon frère, et en tant que tel tu crois aux symboles et aux présages. Qui sait ce qui apporte la bonne fortune ? Ton premier pari ? Ton premier gain offert aux croupiers ? Un homme sage doit assurément faire un petit sacrifice avant de commencer à jouer.

La femme prit la parole.

— Il a peut-être raison, Enex. Helga a un jour jeté une pièce à un mendiant et elle a gagné mille stergals.

Bon psychologue, songea Dumarest tandis que l’homme fouillait dans sa poche. Mais les moines étaient passés maîtres dans cet art. Dumarest jeta une pièce dans la sébile et monta l’escalier.

À l’intérieur, il faisait chaud, des courants d’air odorant chassaient des volutes de fumée colorée devant des lanternes pendues aux plafonds décorés. Les lieux étaient tels qu’il les attendait : des tables pour jouer aux cartes, aux dés, des roulettes. Les jeux étaient également familiers : l’homme-entre-deux, le poker, le spectre, les sept, le brûlétoile, le brenzo.

Une espèce de tube transparent contenait une masse de spores qui tournoyaient ; la voix du croupier était un son monotone.

— La bataille commence. Choisissez le rouge, le bleu ou le vert. Le photomètre dira quelle couleur est ascendante à l’expiration des soixante secondes. Faites vos jeux. Les jeux sont faits. La partie commence.

Il appuya sur un levier. Des produits nutritifs se déversèrent dans le récipient et les spores les dévorèrent, se reproduisant, luttant et mourant.

— Jaune !

Le récipient pivota, se vida, étincela de nouvelles spores.

— La bataille commence. Faites vos jeux. Le photomètre…

Dumarest continua sa route. Une fille vêtue de la gorge aux chevilles d’une robe collante de soie brodée lui offrit un plateau de pâtisseries et de vin généreux. Les hommes au cerveau enfumé devenaient des joueurs maladroits.

Il l’écarta et se dirigea vers le restaurant. Akon Batik ne serait pas pressé de lui envoyer son messager. Son sens des affaires pousserait à le faire attendre et peut-être jouer, perdant une partie de l’argent qu’il avait reçu pour la chorismite. Il aurait donc largement le temps de manger, ce qu’il avait appris à faire dès qu’il y avait de la nourriture à sa disposition. Un voyageur n’était jamais sûr de l’heure à laquelle il allait pouvoir déjeuner.

Il commanda de la viande, des légumes verts, du fromage et un vin léger. La viande était bonne et il la mangea lentement. Le fromage était bizarrement piquant et truffé de graines qui se dissolvaient en un liquide aigrelet. Le vin était sec, parfumé à la rose, parcouru de bandes rouges. Il était en train de finir de vider la bouteille lorsqu’un homme se glissa sur la chaise en face de lui.

— Dumarest ? Earl Dumarest ?

Dumarest hocha la tête.

— Akin Tambolt. Vous m’attendez.

— Vraiment ?

— Bien sûr. C’est le bijoutier qui m’envoie.

— Son nom ?

Tambolt eut un rire qui révéla ses dents blanches et robustes.

— Vous êtes prudent ; je ne peux vous en vouloir. À Sargone, n’importe quoi peut arriver et arrive généralement. Très bien, donnons des noms. Akon Batik, ça vous va ?

Il était jeune, avec une maturité sévère autour des yeux et de la bouche. Une carcasse large et costaude qui se transformerait par la suite en graisse s’il n’y prêtait garde. Il portait des vêtements épais et pratiques, un pantalon et des bottes hautes, une chemise d’ébène entaillée qui laissait voir un gilet métallique protecteur. Un costume de voyageur ou d’homme habitué à une vie sans sécurité. Ses mains étaient larges, robustes, les ongles étaient courts. Une joue arborait une cicatrice. Il avait d’épais cheveux bruns tachetés d’auburn qui descendaient sur les oreilles et le cou. Il portait une chevalière à chaque auriculaire. De grosses bagues avec une pierre pointue. Des armes commodes pour qui savait les utiliser.

Un spadassin, songea Dumarest. Un opportuniste. Un homme qui vivait en marginal et était prêt à tout pour de l’argent.

— Il était question d’argent, dit Tambolt. Vingt stergals.

— Dix.

— Dix, en effet, mais vous ne m’en voudrez pas d’avoir fait une tentative. Donnez.

— Pourquoi ? Parce que vous me l’avez demandé ?

— Vous voulez savoir ce que j’ai appris ou non ?

— Je le découvrirai, dit Dumarest. D’une façon ou d’une autre, je le découvrirai. Vous voulez parier ?

Un instant, leurs regards s’affrontèrent, puis Tambolt haussa les épaules.

— Un jour, peut-être, dit-il d’une voix égale. Mais pas maintenant. Si on prenait un verre ?

Dumarest commanda une bouteille et regarda l’autre homme se verser un verre.

— À votre santé, Earl. Vous avez mangé ?

— Oui.

— Dommage, je meurs de faim. (Il appela la serveuse et passa sa commande.) Cela ne vous dérange pas ?

— Absolument pas.

— Vous êtes généreux, Earl. J’aime les gens généreux.

— Je ne suis pas généreux, dit Dumarest. Seulement impatient. Qu’avez-vous à me dire ?

— Rien. Rien qui paraisse utile. Le joaillier a transmis le message et posé les questions là où il fallait. Personne ne semble avoir engagé d’homme de main pour enlever le gamin. Les gars à qui vous avez réglé leur compte ont dû venir d’en dehors de la ville. C’est cela ou bien personne n’admet les avoir vus auparavant. Quant aux autres, ceux qui ont attaqué la ferme… pas les Melevganiens… même topo.

Son repas arriva et il mangea avec une faim à peine dissimulée.

— Bien entendu, ces sources d’information ont pu mentir, mais je ne le pense pas. Akon est en relation avec tous les gens importants et Sargone n’est pas tellement grande. On écoute, on se met au courant, on parle si ça peut rapporter. Quiconque voulait le petit a dû prendre des précautions. Ils ont dû utiliser leurs propres hommes et, dans ce cas, vous aboutissez à un cul-de-sac.

— Peut-être pas. Le mari, Elray, avait pu avertir quelqu’un de son arrivée. Autrement, l’attaque en ville n’aurait aucun sens. Personne n’aurait su quand passer à l’action.

— Le mari ? (Tambolt avala la dernière bouchée.) Vous pensez qu’il était de mèche ?

— Jondelle n’était pas son fils. Il dépendait de sa femme et il voulait peut-être la quitter. Si l’occasion était là, il a pu en profiter.

— De l’argent pour l’enfant, il faisait semblant de le pleurer, puis il disparaissait tranquillement, (Tambolt branla du chef.) Cela a pu se passer de la sorte, mais qui était prêt à payer pour avoir ce gosse ? D’habitude, tout se passe dans l’autre sens. On vole l’enfant et l’on exige une rançon.

— Oui.

— Ce qui vous amène à réfléchir et à parvenir à une hypothèse intéressante. Le petit doit avoir une grande valeur pour quelqu’un. Celui qui l’a kidnappé doit connaître le marché et ce que peut rapporter la marchandise. Mais vous y avez déjà pensé, naturellement.

— Oui.

— Ce qui explique peut-être votre intérêt. Je me suis interrogé. Vous n’êtes pas parent de l’enfant ; que peut donc bien vous importer son enlèvement ? Mais si vous connaissez le marché…

— Dans ce cas, je ne perdrais pas mon temps ici.

— Peut-être. Ou bien vous savez où il se trouve et vous voulez avoir la marchandise sous la main. (Tambolt émit un bruit de suçotement.) Dites, cette viande est excellente. Ça vous dérange que j’en reprenne ?

— Mangez autant que vous voulez : c’est vous qui payez.

— Quoi ?

— Avec l’argent que vous espérez de moi. Les dix stergals promis. Ça n’en fait plus que sept, maintenant.

— Salopard !

Tambolt serra le poing et un éclair jaillit de la pointe de la pierre qu’il portait à la chevalière.

— Vous ne pouvez pas me faire ça !

— Non ? (Dumarest sourit). Vous pensiez qu’il était facile de m’escroquer ? Vous êtes un vrai gosse, mon vieux. Jusqu’à présent, vous ne m’avez rien appris de valable. D’accord, vous n’êtes qu’un messager et peut-être n’est-ce pas votre faute. (Il tendit lentement la main vers la bouteille et se servit.) À votre santé. À voir la façon dont vous avez mangé cette viande, les affaires ne marchent pas très fort, ces derniers temps.

— Ça, vous pouvez le dire. (Tambolt prit longuement son souffle et desserra le poing.) J’ai commis une erreur, admit-il. J’ai essayé d’obtenir davantage que ce qui était prévu et je me suis ramassé. J’ai reçu une bonne leçon.

Il se servit à boire, se carra dans son siège et caressa son verre, l’air plus âgé et un peu hébété. Un homme qui avait revêtu l’habit d’un rôle qu’il avait fait de son mieux pour tenir et qui goûtait maintenant le fruit amer de l’échec.

— Akon m’a donné ce boulot. J’ignorais qui vous étiez… mais cela n’a plus d’importance. Vous êtes prêt à aller jusqu’où pour retrouver ce gosse ?

— Amenez-le-moi et je vous paierai le prix d’un passage en Haut.

— Jargon de voyageur. Passage en Haut, en Bas, dans l’Entre-Deux si l’on peut avoir une couchette à bord d’un astronef. Vous avez beaucoup voyagé ?

— Oui.

— Moi aussi, j’ai voyagé mais très peu. Deux fois, suffisamment pour savoir qu’il ne fallait plus que je tente ma chance. J’ai vu un homme qui avait fait un voyage de trop. Quand le sarcophage a été ouvert, il était mort. Il était plus jeune que moi. Ourelle me paraissait prometteur, alors j’y suis resté. Et maintenant, je n’ai pas de quoi me payer un repas correct. (Il sirota le vin.) Croiriez-vous que je possède un diplôme de géologie ?

— Est-ce important ?

— Non, pas vraiment. J’ai un peu travaillé pour la Kladour, mais… enfin, disons que nous n’étions pas d’accord sur les remboursements de frais. Les expéditions peuvent coûter cher. Et je n’ai pas toujours donné ce que j’avais découvert. (Tambolt regarda ses chevalières.) Jolies pierres, hein ? Fausses, bien sûr, mais à première vue on les dirait vraies. Seulement, la Kladour ne se contente pas de la première vue. J’ai essayé de faire monter les mises en jouant et j’ai tout perdu. Un jour, je comprendrai la leçon. Quand je serai mort, peut-être. Quand ce sera trop tard.

Il vida son verre qu’il remplit à nouveau et dont il avala la moitié du contenu d’une seule gorgée comme en un geste de défi s’adressant à un démon personnel. L’avidité, peut-être, ou le sentiment d’être imparfait, ou encore une cécité intellectuelle qui lui faisait sous-estimer tout ce qu’il affrontait. À moins qu’il ne mente, songea Dumarest, qu’il ne présente une façade qu’il espérait apitoyante.

— Alors, l’enfant ? demanda Dumarest. |

— Vous voulez le retrouver. Peut-être que je peux vous aider.

— Comment ?

— Vous le savez, Earl. Vous avez dû y penser. Les Melevganiens qui ont attaqué la ferme n’étaient pas seuls. Des étrangers ont emporté le gamin. Mais où ? On ne sait pas. Qui étaient-ils ? Nous l’ignorons également. Mais les Melevganiens le savent peut-être. Il faut donc les retrouver et les faire parler Exact ?

Il versa encore du vin comme Dumarest ne répondait pas.

— Je commence à comprendre pourquoi Akon m’a choisi pour porter ce message. Il est vieux, malin et voit ce qui est évident. Vous voulez aller à Melevgan, il y a là-bas des pierres précieuses, des objets de valeur, et il sait que nous prendrons ce que nous trouverons. De gros bénéfices sans courir de risque. Pas étonnant qu’il soit riche.

— Je cherche cet enfant, pas une poignée de gemmes.

— Vous pourriez trouver les deux… ou rien du tout. Vous vous imaginez que c’est facile ? Allez à Melevgan n’a rien d’une promenade de santé. J’y suis allé et je sais de quoi je parle. Un geste déplacé et vous êtes mort. Vous avez besoin de moi, Earl. On s’associe ?

Dumarest se laissa aller en arrière en sirotant son vin. Derrière la salle à manger, on entendait les susurrements des joueurs en action, le claquement des dés, les soupirs, les cris de joie et les expressions d’écœurement. Les adorateurs de la déesse Chance. Ils la mettaient à l’épreuve, ainsi que le font tous les hommes pour rester en vie. Mais les chances n’étaient pas toujours aussi favorables. La plupart pouvaient reprendre leur gain, d’autres non. Jondelle, par exemple.

— Que nous faudrait-il ? demanda-t-il.

— Une chaloupe. De quoi faire des échanges. Des armes et des hommes. Ce ne sera pas gratuit.

— Mille ?

— Insuffisant. (Tambolt insista.) Une chaloupe coûte bonbon… personne ne t’en louera et il faudra donc en acheter une. Les monnaies d’échange représenteront la moitié, les armes davantage encore, et ensuite il faudra trouver quelques hommes. Ils se feront payer cher.

Dumarest songea à ce qu’il avait laissé à la ferme. À la ferme et sur la route.

— Il ne nous faut pas une chaloupe, rien qu’un moteur. Nous pourrons en louer une pour nous emmener jusqu’à la ferme. Qu’aiment-ils en matière de monnaie d’échange ?

— Les Melevganiens ? Des objets manufacturés ; des projectiles pour leurs lances, des circuits électroniques, des forets, des machines-outils, des trucs comme ça. L’argent suffira, ainsi que le moteur, mais pour les hommes ?

Dumarest termina son vin.

— Je me charge des hommes.

1 Mausolée galactique, L’Aventurier des Etoiles n° 6.

2 La Sorcière de l’Espace, l’Aventurier des Etoiles n° 4.